Note : la couronne Tchèque, qui vaut 1/25è d’euro, est ici remplacée par diverses monnaies aux noms plus marrants.
C’est le moment de partir de Prague, qui nous laisse une série de souvenirs mémorables. Seulement la ville décide de ne pas se laisser quitter aussi facilement. Le check out effectué promptement, nous nous dirigeons vers un écueil imprévu : un supermarché. Deux heures dans ce Tesco, à essayer tous les produits et limiter nos dépenses, encerclés par tant de produits inconnus que nous devons absolument acheter. Surtout quand les boites ne possèdent pas d’images et qu’on ne comprend pas du tout ce qu’elles contiennent. Notons tout de même, ce qui a de l’importance pour la suite, l’achat groupé de 3 paires de lunettes de soleil identiques. Un achat qui va s’avérer très utile.
Avec déjà deux heures de retard sur le planning, nous allons payer le parking pour enfin partir. Il manque 100 kopeks pour faire le bonheur du gardien. Cet homme est aimable comme une porte de goulag en plein cœur de la Sibérie. Nous allons retirer la somme demandée en le maudissant, et dépensons le surplus en cigarettes. Nos poumons vont sortir de ce voyage légèrement fatigués. Le plein fait, la voiture bourrée de nourriture Tchèque dont différents camemberts, des pâtés très peu chers et des poulpes à l’ail, nous partons enfin et laissons Prague à son hyperactivité fourmillante de vie.
Sur la route, nous passons la frontière Autrichienne, en direction de Vienne. Une étape à Cracovie était prévue au départ, mais trop de voiture tue la voiture et ce crochet nous empêchait de profiter de la Croatie et de Budapest, destinations aussi au programme. 100 mètres après la frontière Autrichienne, le paysage change. Les champs, cultivés au carré, la terre égalisée et la campagne bien découpée ont des airs de Beauce. En Tchéquie, rien de semblable, le pays n’a pas les mêmes moyens, et la discipline autrichienne ne ressemble pas au bazar ambiant qui se dégage des villes tchèques.
Avant d’arriver nos ventres réclament un déjeuner typiquement tchèque, et nous leur offrons. Les boites de pâté à 10 sesterces et le fromage mou à 15 roubles nous troublent : les premiers prix français sont mangeables. Pas les premiers prix tchèques. Seules les Chips gout pickles belges et le pain, qui n’est pas de premier prix, apportent un peu de réconfort dans cet enfer. Bien entendu, étant des élèves de la vieille école, nous ne jetons aucun plat avant d’avoir fini la boite entière. S’ensuit une danse de guerre sur le bord de la voie rapide, au son de TTC. Les voitures qui passent ne semblent pas comprendre la portée totémique et cathartique d’une telle action, mais de toute façon, c’est soit ça soit vomir tout le repas.
L’arrivée à Vienne, vers 18 heures, est un soulagement. L’auberge de jeunesse est surprenante : nous rentrons dans une allée en haut d’une colline, bordée d’un palais et de plusieurs Porsche Cayenne. Nous avons une chambre de 5 lits réservée pour trois, pour la modique somme de 15 euros par personne et par nuit. Légèrement éloignés du centre, nous jouissons d’une vue imprenable sur Vienne et d’un mini-golf. Un mini golf annonce, comme tout le monde le sait, une partie de picolo-golf, ce jeu si sympathique qui consiste à picoler en jouant au golf !
Nous n’avons pas assez pour payer les trois clubs avec les balles, mais le jovial portier nous fait une fleur. Nous l’avons amadoué avec nos moustaches et nos blagues, qu’il ne semblait pas comprendre. Cela nous rappelle que les autrichiens, comme les allemands, sont un peuple chez qui l’humour est une qualité aussi utile que des bras à un manchot : ils ne savent vraiment pas quoi en faire.
Quand ce déconneur de Zoule propose à ce brave autrichien de ranger nos fromages dans le bac frigorifique de l’auberge, à coté des glaces payantes, il ne semble pas comprendre le trait d’humour. Nous abandonnons l’idée de le faire rire en nous rappelant les figures les plus connues du pays : les gouailleurs Freud, Mozart et Hitler. Nous le laissons à ses stylos et partons déguster nos bières tchèques sur le terrain de golf. Ce qui devait être une rapide partie avant une visite de Vienne tourne vite à la débâcle…
La première bière en appelant une seconde, et la seconde appelant la bouteille de rhum tchèque, les règles évoluent vite. Le premier arrivé à finir un trou distribue autant de gorgées que l’écart de coups le séparant du dernier, à son bon vouloir. Le second choisi le trou suivant, et recommence à jouer. En cas d’égalité premier/deuxième, le troisième arrivé boit le double de gorgées du nombre de coups le séparant des deux autres. En cas de triple égalité, chacun boit trois gorgées. La nuit tombée, les balles se perdent vite dans les buissons, et à la fin de la partie nous rendons seulement deux balles au gardien, qui ne sont même pas celles d’origine. Décidément, les français sont infréquentables !
La soirée s’achève doucement, en profitant de la vue de Vienne la nuit. Mais le réveil risque d’être fort difficile, le rhum tchèque étant aussi utilisé pour faire friser les blonds et pour démarrer les tronçonneuses. Il nous a pris en traitre, ce pendard, et la visite de Vienne devra attendre le lendemain.
Picolo-golf : 1 ; Houle : 0. A quand une victoire de la houle ?